Christelle FERREIRA

Christelle FERREIRA

Thérapeute
Quand mon amie m'a dit : "En fait, tu es ma psy"

Quand mon amie m'a dit : "En fait, tu es ma psy"

Au lycée, il y a ces amitiés qui marquent, qui nous accompagnent bien au-delà des années d’adolescence. Ma meilleure amie de l’époque était interne. Chaque semaine, elle vivait à l'internat, et le week-end, elle retrouvait sa famille recomposée, avec un beau-père avec qui la relation était souvent tendue. Très vite, elle a trouvé en moi une oreille attentive, un espace où déposer ses doutes, ses peines, ses colères, sans crainte d’être jugée.

 

Je me souviens encore de ces longues discussions, parfois sur un banc du lycée ou lors de promenades improvisées dans la cours. Le monde autour de nous semblait bruyant, mais dans notre bulle, il y avait quelque chose de calme. Elle se confiait sur ses difficultés, sur ce qu’elle ressentait, sur ce qu’elle n’osait pas dire à d’autres. J’écoutais, tout simplement, sans chercher à donner de conseils, sans juger, en essayant juste d’être présente et bienveillante.

 

Et puis un jour, alors qu’elle venait de vider son cœur, elle a lâché cette douce petite bombe :
« En fait, tu es ma psy. Je peux tout te dire et tu écoutes sans jugement. » Sur le moment, j’ai souri, un peu gênée, mais aussi profondément touchée par la confiance qu’elle m’accordait. À cette époque, je n’envisageais absolument pas de devenir thérapeute. J’étais simplement une amie, présente, à l’écoute, sans imaginer que ce rôle pouvait avoir une telle importance.

 

Et pourtant… cette phrase s’est installée, elle ne m’a jamais quittée. Je n’y ai pas pensé tous les jours, mais elle a continué à résonner, comme une petite graine plantée sans que je m’en rende compte. Comme si elle avait ouvert une porte dans un coin de ma tête. Avec le recul, je réalise à quel point cette expérience a été fondatrice. Elle m’a appris l’importance de l’écoute active, du non-jugement, et de la présence authentique. Ce sont ces valeurs qui m’animent aujourd’hui dans ma pratique professionnelle.

 

À l’époque, je ne mesurais pas la portée de ce que je faisais. Je pensais simplement être une amie “normale”, mais j’ai compris plus tard que l’écoute, la vraie, celle qui accueille sans chercher à corriger ou à minimiser, est rare et précieuse. C’est souvent ce dont nous avons le plus besoin, surtout à l’adolescence, quand tout semble compliqué et que les repères vacillent.

 

Aujourd’hui, en tant que thérapeute, je repense parfois à cette période. Je me rends compte que, sans le savoir, j’expérimentais déjà les bases de ce qui fait la force d’une relation d’aide : la confiance, la confidentialité, l’absence de jugement, et surtout, la capacité à accueillir l’autre tel qu’il est, avec ses forces et ses fragilités.

 

Être thérapeute, ce n’est pas seulement apporter des solutions ou des réponses toutes faites. C’est avant tout offrir un cadre sécurisant, où chacun peut déposer ce qu’il porte, à son rythme, sans crainte d’être jugé. Parfois, il suffit d’être là, simplement, pour faire une vraie différence dans la vie de quelqu’un. Je crois que nous avons tous, à un moment ou à un autre, été “la psy” de quelqu’un, même sans en avoir conscience. Et parfois, une simple phrase, un mot, ou une présence attentive peuvent semer des graines qui germeront bien plus tard, dans des directions inattendues.

 

Si je partage cette anecdote aujourd’hui, c’est pour rappeler que l’écoute et la bienveillance sont des ressources précieuses, accessibles à tous. Nous n’avons pas besoin d’être thérapeute pour offrir cela à nos proches. Parfois, il suffit d’être là, d’écouter, de soutenir, sans chercher à tout comprendre ou à tout résoudre.

 

Et vous, avez-vous déjà été “la psy” de quelqu’un sans le savoir ? Ou avez-vous trouvé, à un moment de votre vie, cette oreille attentive qui a tout changé pour vous ?